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Une autre Rome, « Les métamorphoses d’une métropole : du “miracle italien” au “chaos urbain” ? (1950–2020) »
Pierre Gras, Editions Libel, 2021
Si la ville éternelle ne cesse de hanter l’imaginaire occidental depuis le XVIe siècle, on observe que l’historiographie française s’est relativement peu intéressée à la Rome contemporaine comme si celle-ci avait été figée dans une impassibilité héroïque, une fantasmagorie poétique à laquelle l’italophilie du XIXe siècle, n’est certainement pas indifférente.
Comment se définit cette « autre Rome », celle de la seconde moitié du XXe siècle, celle du miracle italien des années 1950–1960 et de l’époque actuelle ? Comment appréhender l’urbs dans ses multiples dimensions et toute l’épaisseur historique nécessaire ? considérant que la ville s’est construite au fil des siècles sur une idée, celle de la permanence du fait urbain dans une visée des plus équivoques tant cette « éternité romaine » suscite à la fois fascination, doutes et sentiments désabusés.
Rome interroge – il est vrai plus qu’aucune autre ville – constamment les rapports entre le temps et l’espace tout en souffrant du mythe de la « fatalité historique », qui aurait présidé au choix de la ville comme capitale du nouvel État italien.
Plus encore que la ville-centre et les questions patrimoniales, qui servent de décor à la narration, ce sont les périphéries et les interstices, les zones non définies qui intéressent l’auteur, comme autant d’épicentres des paradoxes romains.
Mais derrière les épineuses questions soulevées par la gestion de l’aire métropolitaine de Rome, s’esquisse un autre portrait de la ville – plus charnel si l’on considère que Rome est devenu un personnage à part entière –, celle d’une société en proie à une désillusion croissante au terme du miracle italien, « une crise permanente » selon l’auteur, dans un contexte marqué paradoxalement par un foisonnement intellectuel et culturel exceptionnel.
L’une des qualités de l’ouvrage est précisément de placer le fait urbain à mi-chemin entre une histoire politique et culturelle, une histoire des formes et une histoire sociale et économique. C’est l’idée de laboratoire qui se dégage nettement du cas romain « tout en posant à l’aménagement urbain la question inévitable de l’articulation des échelles et des temporalités », avec pour corollaire les ambiguïtés que la ville contemporaine cultive avec son patrimoine : matrice ou faire-valoir à l’heure des métropoles ? Faut-il parler de résilience romaine comme le suggère Pierre Gras en épilogue ? « Ville invisible » ou véritable « miracle permanent » ?
En tout état de cause, ce nouvel opus ne tardera pas à s’imposer comme une référence obligée, ne serait-ce qu’en raison de l’apport profondément original qu’apporte l’étude de la « question romaine » à l’intelligence du monde contemporain à travers ses différents paradigmes : patrimoine/modernité, centre/périphéries, local/global, politique/société civile. / Philippe Dufieux
Pierre Gras, Editions Libel, 2021
Si la ville éternelle ne cesse de hanter l’imaginaire occidental depuis le XVIe siècle, on observe que l’historiographie française s’est relativement peu intéressée à la Rome contemporaine comme si celle-ci avait été figée dans une impassibilité héroïque, une fantasmagorie poétique à laquelle l’italophilie du XIXe siècle, n’est certainement pas indifférente.
Comment se définit cette « autre Rome », celle de la seconde moitié du XXe siècle, celle du miracle italien des années 1950–1960 et de l’époque actuelle ? Comment appréhender l’urbs dans ses multiples dimensions et toute l’épaisseur historique nécessaire ? considérant que la ville s’est construite au fil des siècles sur une idée, celle de la permanence du fait urbain dans une visée des plus équivoques tant cette « éternité romaine » suscite à la fois fascination, doutes et sentiments désabusés.
Rome interroge – il est vrai plus qu’aucune autre ville – constamment les rapports entre le temps et l’espace tout en souffrant du mythe de la « fatalité historique », qui aurait présidé au choix de la ville comme capitale du nouvel État italien.
Plus encore que la ville-centre et les questions patrimoniales, qui servent de décor à la narration, ce sont les périphéries et les interstices, les zones non définies qui intéressent l’auteur, comme autant d’épicentres des paradoxes romains.
Mais derrière les épineuses questions soulevées par la gestion de l’aire métropolitaine de Rome, s’esquisse un autre portrait de la ville – plus charnel si l’on considère que Rome est devenu un personnage à part entière –, celle d’une société en proie à une désillusion croissante au terme du miracle italien, « une crise permanente » selon l’auteur, dans un contexte marqué paradoxalement par un foisonnement intellectuel et culturel exceptionnel.
L’une des qualités de l’ouvrage est précisément de placer le fait urbain à mi-chemin entre une histoire politique et culturelle, une histoire des formes et une histoire sociale et économique. C’est l’idée de laboratoire qui se dégage nettement du cas romain « tout en posant à l’aménagement urbain la question inévitable de l’articulation des échelles et des temporalités », avec pour corollaire les ambiguïtés que la ville contemporaine cultive avec son patrimoine : matrice ou faire-valoir à l’heure des métropoles ? Faut-il parler de résilience romaine comme le suggère Pierre Gras en épilogue ? « Ville invisible » ou véritable « miracle permanent » ?
En tout état de cause, ce nouvel opus ne tardera pas à s’imposer comme une référence obligée, ne serait-ce qu’en raison de l’apport profondément original qu’apporte l’étude de la « question romaine » à l’intelligence du monde contemporain à travers ses différents paradigmes : patrimoine/modernité, centre/périphéries, local/global, politique/société civile. / Philippe Dufieux
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